Politique de l’égalité
Version originale en allemand
L’objectif ultime de la politique de l’égalité est qu’il n’existe plus de barrières fondées sur le sexe faisant obstacle à une participation pleine et entière à la vie économique, politique et sociale. Cela signifie que tous les êtres humains doivent avoir la possibilité de développer librement leurs capacités individuelles et de prendre des décisions, sans être limités par des stéréotypes de genre. Enfin, il s’agit que les éventuelles différences de comportement, d’intérêts et de besoins des femmes et des hommes soient prises en compte, reconnues et promues de façon égale.
La politique de l’égalité recouvre l’ensemble des institutions, des bases légales, des objectifs et des mesures soutenus par les pouvoirs publics pour concrétiser le mandat constitutionnel et remplir les obligations contractées à travers divers engagements internationaux, en particulier celles issues de la Convention sur l’élimination des discriminations envers les femmes (CEDEF), ratifiée par la Suisse en 1997. La CEDEF traite d’une vaste palette de thèmes : droit, structures et financement pour l’égalité, mesures de discrimination positive, stéréotypes et pratiques préjudiciables, violence à l’égard des femmes, traite des êtres humains et exploitation de la prostitution, positions de pouvoir et de décision dans le domaine politique ou économique, éducation, emploi et sécurité sociale, santé, femmes rurales, réfugiées, requérantes d’asile et autres groupes défavorisés, mariage et relations familiales.
Pour réaliser l’égalité de droit et de fait, la Suisse a institué, en 1988, un Bureau fédéral de l’égalité entre femmes et hommes (BFEG), dont le mandat est de faire avancer l’égalité entre les sexes dans tous les domaines de la vie et d’éliminer toutes formes de discrimination directe et indirecte. Sur le plan thématique, le BFEG met l’accent sur l’égalité dans la vie professionnelle – et plus spécifiquement sur l’égalité salariale –, sur la conciliation entre les vies professionnelle et familiale, sur l’égalité juridique et enfin sur la lutte contre la violence dans les relations de couple. Ses modes d’intervention vont de l’information de la population aux études et conseils pour les autorités, en passant par le développement d’outils et les contrôles de l’égalité salariale dans les entreprises ayant obtenu un marché public. Le BFEG peut par ailleurs accorder des aides financières à des organisations à but non lucratif pour mener des projets visant à encourager l’égalité dans la vie professionnelle.
Parmi les autres instances chargées de l’égalité au niveau fédéral, se trouve la Commission fédérale pour les questions féminines (CFQF), commission extraparlementaire permanente, dont la mission est de conseiller le Conseil fédéral et qui dispose d’une large autonomie quant aux sujets à traiter.
Les questions d’égalité sont un élément important non seulement de la politique intérieure, mais aussi de la politique extérieure. Les inégalités entre les sexes constituent en effet l’un des principaux obstacles à la croissance économique et à la réduction de la pauvreté. C’est pourquoi la Direction du développement et de la coopération (DDC) intègre une perspective de genre dans l’ensemble de ses activités et projets. De façon plus générale, dans sa politique extérieure des droits humains, la Suisse s’engage résolument pour les droits des femmes et leur autonomisation, ceci au niveau bilatéral comme au niveau multilatéral. Concernant la nouvelle feuille de route mondiale du développement durable pour 2030, adoptée par les États membres des Nations Unies en 2015, la Suisse a participé activement à ce que l’égalité des sexes figure non seulement comme un thème transversal se reflétant dans tous les objectifs, mais aussi comme un objectif spécifique.
Dix-neuf cantons et cinq villes possèdent au moins une institution, bureau ou commission, chargée des questions d’égalité, avec des ressources et des mandats très variables : personnel administratif, famille, diversité, intégration, éducation, violence. Les bureaux sont réunis en une Conférence suisse des délégué·e·s à l’égalité, qui assure l’échange de bonnes pratiques et coordonne des projets d’importance nationale. En outre, les universités et les hautes écoles spécialisées disposent de leurs propres bureaux de promotion de l’égalité des chances, qui possèdent, eux aussi, leurs propres structures de coordination.
Malgré ce maillage en apparence dense, les moyens financiers et humains de ces structures sont souvent modestes et une demi-douzaine de cantons, tous situés en Suisse alémanique, ne disposent pas de mécanisme institutionnel, alors même que le Tribunal fédéral a stipulé, dans un jugement décisif datant de 2011, que tous les cantons devaient se doter des mesures institutionnelles et organisationnelles pour l’accomplissement du mandat constitutionnel.
Au cours des deux dernières décennies, des changements importants ont pu être apportés, parmi lesquels on citera le nouveau droit du mariage (1988), la nouvelle loi sur la nationalité (1992), la loi sur l’égalité (1996), la 10e révision de l’AVS (1997), le nouveau droit du divorce (2000), la dépénalisation de l’interruption volontaire de grossesse (2002), la poursuite d’office des délits de violence dans le couple (2004), l’allocation de maternité (2005), l’instauration dans le droit civil d’une protection contre les violences, menaces et harcèlement (2007), l’instauration dans le Code pénal d’une interdiction des mutilations génitales féminines (2012) et du mariage forcé (2013), le nouveau droit de nom et de cité (2013) ou encore l’autorité parentale conjointe comme règle générale (2014).
En dépit de ces avancées majeures, il reste du chemin à faire sur la voie de l’égalité. Les femmes continuent d’être moins bien rémunérées que les hommes. La conciliation entre le travail et la famille demeure difficile pour les deux parents : il y a trop peu de places d’accueil extrafamilial pour les enfants. La proportion de femmes élues dans le Parlement fédéral demeure encore faible. Filles et garçons sont toujours fortement influencés par des stéréotypes dans le choix de leur formation, de leur profession et de leur mode de vie. Enfin la violence domestique est un fléau répandu : en moyenne, elle tue environ une personne toutes les deux semaines, ce qui signifie que près de la moitié des homicides sont commis dans ce contexte.
La politique de l’égalité figure donc encore dans le programme de législature de la Confédération, où l’on peut observer une double approche, d’un côté sectorielle et spécifique, et de l’autre, transversale et intégrée (gender mainstreaming). À cet égard, il ne faudrait pas oublier que, si la politique de l’égalité peut contribuer substantiellement aux politiques familiale, sociale et économique, l’égalité est d’abord et avant tout une question de droit.
Références
Bureau fédéral de l’égalité entre femmes et hommes (Éd.) (2014). Quatrième et cinquième rapport de la Suisse sur la mise en œuvre de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDEF). Berne : Confédération suisse.Derungs, F., Lüthi, J., Schnegg, B., Wenger, N. & Ganzfried, M. (2014). Égalité entre femmes et hommes – Plan d’action de la Suisse : bilan 1999-2014. Berne : Bureau fédéral de l’égalité entre femmes et hommes.
Liebig, B., Gottschall, K. & Sauer, B. (Éd.) (2016). Gender equality in context : theories, practices, and perspectives in Switzerland. Opladen : Barbara Budrich.