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Droit du bail

François Bohnet


Première édition: December 2020

Le bail est le contrat par lequel une bailleresse ou un bailleur s’oblige à céder l’usage d’une chose à une personne locataire ; celle-ci s’oblige à verser à la bailleresse ou au bailleur un loyer, la plupart du temps en espèces. Le droit du bail est constitué par l’ensemble des règles régissant cette relation contractuelle.

Dans sa conception traditionnelle, le bail est soumis à l’autonomie des parties. L’État met à disposition des parties des règles qui trouvent application à moins que les parties conviennent d’y déroger. L’État met également à disposition des tribunaux dont la tâche est la constatation de l’existence et de l’étendue des relations juridiques entre les parties, en fonction des éléments présentés et des conclusions prises par elles. Ce concept est conforme à la garantie de la propriété de la bailleresse ou du bailleur et assure la liberté contractuelle ainsi que la liberté économique des parties, éléments fondamentaux d’un système libéral.

Toutefois, l’application sans restriction de ce concept mène à des résultats insatisfaisants sur le marché des baux d’habitation et de locaux commerciaux. Le logement est un besoin élémentaire, chaque individu doit disposer d’un toit pour se protéger contre les forces naturelles et assurer le respect de sa sphère privée ; les activités commerciales supposent elles aussi un lieu pour les exercer. Les locataires se trouvent de facto dans une situation d’obligation de contracter. En cas de demande croissante pour des logements, l’offre peut uniquement être augmentée dans un cadre restreint, étant donné le caractère limité de l’un des facteurs de production, à savoir le sol. De plus, même s’il est possible d’augmenter l’offre, le processus de planification et de réalisation de nouveaux locaux d’habitation prend un certain temps. Il existe donc un déséquilibre sur le marché locatif entre locataires et bailleresses/bailleurs qui disposent d’une position plus forte dont ils peuvent potentiellement abuser au détriment des locataires, notamment par des loyers exorbitants, d’autres conditions défavorables aux locataires ou des résiliations chicanières. Un tel comportement abusif pourrait entraîner, pour des parties importantes de la population, la privation d’un logement décent, situation mettant en danger la paix sociale. En outre, le logement ne satisfait pas seulement à un besoin élémentaire, mais constitue également le centre des relations familiales et sociales des locataires qui disposent d’un intérêt digne de protection à une certaine stabilité de leur situation.

Compte tenu de ces éléments, le législateur suisse est depuis longtemps intervenu sur la relation entre locataires et propriétaires. Après des régimes provisoires successifs, une base constitutionnelle autorisant la Confédération à légiférer afin de lutter contre les abus, notamment les loyers abusifs, ainsi que sur l’annulabilité des congés abusifs et la prolongation du bail pour une durée déterminée, a été créée en 1982 et de nouvelles dispositions réglant le droit du bail dans le Code des obligations sont entrées en vigueur le 1er juillet 1990 (nouveau droit du bail).

Le droit du bail à loyer en vigueur est le résultat d’un combat politique entre les propriétaires immobiliers et leurs représentant·e·s d’un côté, et les locataires et leurs associations de l’autre. Il est le fruit d’un compromis permettant de maintenir l’attractivité d’investissements dans l’immobilier tout en atténuant les conséquences du déséquilibre de forces entre propriétaires et locataires.

Le régime de protection mis en place permet aux locataires de :contester, dès la conclusion du bail, un loyer jugé abusif. Le loyer est en principe abusif s’il permet à la bailleresse/au bailleur de réaliser un rendement qui dépasse de plus de 0,5 % le taux hypothécaire de référence ;exiger une baisse de loyer et contester une hausse selon l’évolution des critères relatifs en cours de bail ;remettre en l’état la chose louée si elle est défectueuse ainsi que de consigner le loyer si la bailleresse/le bailleur ne procède pas à la remise en l’état ;prétendre à l’annulation du congé en cas d’abus : la résiliation est abusive lorsqu’elle a été donnée de manière contraire à la bonne foi. La loi mentionne un certain nombre d’hypothèses dans lesquelles le congé doit être considéré comme étant contraire à la bonne foi, notamment la résiliation suite à une contestation de l’augmentation du loyer, une demande de baisse de loyer ou de réparation d’un défaut, à moins que celle-ci soit abusive ;demander une prolongation du contrat (4 ans maximum pour les habitations, 6 ans maximum pour les locaux commerciaux) : la prolongation du bail est accordée aux locataires si le congé est valable, mais que la fin du contrat aurait des conséquences pénibles sans que les intérêts de la bailleresse et du bailleur le justifient.

Références

François Bohnet & Pascal Jeannin

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