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Réadaptation

Stephanie Garlepp, Christian Kätterer

Version originale en allemand


Première édition: December 2020

Selon la définition actuelle de l’OMS, la réadaptation désigne un processus permettant aux personnes avec des handicaps de développer et de maintenir, de manière optimale, leurs potentialités fonctionnelles physique, sensoriel, intellectuel, psychologique et social. La réadaptation crée la base pour que les personnes handicapées acquièrent la meilleure autonomie et autodétermination possible.

Le principe directeur de la réadaptation (en français aussi : réhabilitation) consiste à rétablir l’indépendance et l’autodétermination dans l’environnement préexistant de la personne dans toute la mesure du possible. Si le processus de réadaptation met en évidence que ce n’est pas possible, il convient alors d’ajuster les objectifs ou d’apporter des modifications à l’environnement. La réadaptation d’aujourd’hui est basée sur le modèle de la CIF (Classification internationale du fonctionnement, de l’invalidité et de la santé, ICF en anglais pour International Classification of Functioning, Disability and Health).

En principe, on distingue la réadaptation médicale (généralement assurée par du personnel médical, soignant et thérapeutique), les mesures de réadaptation sociale (toujours réalisées en complément de la réadaptation médicale ou professionnelle) et les mesures de réadaptation et de réinsertion professionnelle proprement dites. La réadaptation peut se dérouler selon un mode stationnaire ou ambulatoire. La collaboration interdisciplinaire est aujourd’hui considérée comme la condition la plus importante pour une réadaptation orientée vers des résultats.

C’est dans le domaine de l’orthopédie que la médecine de réadaptation a fait ses débuts en Suisse. Les racines morales de l’orthopédie et de l’assistance aux personnes handicapées physiques remontent au siècle des Lumières. C’est le médecin et professeur français Nicolas Andry (1658-1742) qui a créé le terme « orthopédie » à Paris. Il l’a popularisé avec son ouvrage L’orthopédie ou l’art de prévenir et de corriger dans les enfants les difformités du corps, publié en 1741. Dans ce livre se trouve l’image du célèbre et hautement symbolique « arbre orthopédique ». Ce dernier ne vise pas à corriger une difformité existante, mais à prévenir son aggravation qui pourrait handicaper un organisme en croissance de manière irréversible. Aujourd’hui encore, nous comprenons la réadaptation orthopédique en ce sens. Jean André Venel (1740-1791) partageait ce point de vue. En 1780, il a fondé à Orbe, dans le canton de Vaud, le premier hôpital orthopédique du monde, dans lequel a été mis en œuvre, pour la première fois, le principe, encore valable aujourd’hui, consistant à offrir une éducation et une formation professionnelle aux enfants handicapés physiques en plus des soins et des traitements médicaux. L’accueil positif des efforts d’André Venel en Suisse romande a conduit à la fondation de l’Hospice orthopédique de la Suisse romande à Lausanne en 1876.

La loi fédérale de 1913 sur la tuberculose encouragea la construction et l’exploitation de cliniques d’altitude, qui furent transformées par la suite, après la découverte de médicaments antituberculeux, en cliniques de réadaptation pour les maladies pulmonaires, cardiaques et d’autres maladies relevant de la médecine interne. Tandis que la réadaptation cardiaque est une prestation obligatoire des caisses-maladie depuis 1977 grâce aux décisions du Département fédéral de l’intérieur et du Tribunal fédéral des assurances, la réadaptation en tant que telle et dans son ensemble ne fut définitivement inscrite dans la loi en tant que prestation de base que lors de la révision de la loi sur l’assurance-maladie (LAMal) en 1994.

Au cours des dernières décennies, la neuroréadaptation s’est imposée à côté des secteurs classiques de la réadaptation de médecine physique, orthopédique, cardiaque et pulmonaire. Cette évolution résulte, aussi, de la consolidation d’une chaîne de traitements de plus en plus efficace comprenant les soins aigus notamment de traumatismes neurologiques sévères et d’accidents vasculaires cérébraux graves. Elle a considérablement modifié l’image des cliniques de réadaptation perpétrée par le sens commun. Quant à la réadaptation gériatrique et paraplégique, organisée selon des normes internationalement reconnues, elle a également connu un développement important.

La Suisse compte dix branches d’assurances sociales qui se complètent. Les quatre assurances sociales importantes en matière de réadaptation socioprofessionnelle sont l’assurance-invalidité (AI), l’assurance-maladie (AMal), l’assurance-accidents (AA) et la prévoyance professionnelle (PP). L’AI est principalement responsable des mesures de réintégration professionnelle (outre les prestations financières).

Le législateur ordonne la prochaine introduction d’un système tarifaire national unique en matière de compensation des prestations stationnaires en Suisse, et ceci également dans le domaine de la réadaptation. Dans ce cadre, le développement d’un système tarifaire dans le domaine de la réadaptation stationnaire est en cours depuis quelques années déjà, ceci sous l’égide de la SwissDRG SA (responsable du développement du système forfaitaire par cas en soins aigus) et sur la base de projets élaborés par H+ (association faîtière des hôpitaux publics et privés) et la CTM (Commission des tarifs médicaux) entre 2011 et 2015. Le système tarifaire ST-Reha consiste principalement à attribuer les patient·e·s à une catégorie de réadaptation donnée et en tenant compte de la gravité. Ce système fait actuellement l’objet d’une évaluation intensive. Son introduction ne devrait pas intervenir avant 2022.

Le mandat légal des assureurs dans le domaine des prestations de l’assurance-accidents englobe la prise en charge des coûts des soins aigus aux victimes d’accidents jusqu’au versement d’une rente d’invalidité. Les problèmes de coordination entre l’hôpital de soins aigus et la clinique de réadaptation ainsi qu’entre la clinique de réadaptation et la réadaptation ambulatoire jusqu’à la réinsertion professionnelle vont en augmentant. L’académisation des professions thérapeutiques et soignantes développera la tendance à des offres thérapeutiques novatrices et fondées sur des données probantes. Cette évolution exige du personnel qualifié et qui continue à se perfectionner. Parallèlement, la pénurie déjà existante de personnel soignant et de médecins aura un impact croissant sur le recrutement de personnel dans l’ensemble du secteur de la réadaptation.

En raison de l’impact négatif de facteurs économiques et démographiques, les mesures de réadaptation et de réinsertion sociales et professionnelles, qui complètent la réadaptation médicale très performante, sont de plus en plus difficiles à mettre en œuvre en Suisse. Souvent, les exigences professionnelles du marché de l’emploi ordinaire sont trop élevées pour les personnes dont la capacité de travail est partiellement limitée. Dans ce contexte, le rôle des cliniques de réadaptation, très pointues, gagne encore en importance, en particulier en matière de suivi post-hospitalisation. Ce suivi doit se mettre en oeuvre en collaboration avec les assureurs et les institutions de rentes afin d’assurer la pérennité d’un processus de réadaptation efficace et la mise en œuvre cohérente de mesures de réinsertion professionnelle efficaces à long terme.

Références

Organisation mondiale de la santé (2001). CIF : classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé. Genève : Organisation mondiale de la santé.

Zäch, G. & Koch, H. (Hrsg.) (2005). Paraplegie : Ganzheitliche Rehabilitation. Basel : Karger.

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